Mon deuxième choix dans le recueil Le cabinet satyrique (publié en 1632) est un poème écrit par le Sieur de Sygognes (peut-être Charles-Timoléon de Beauxoncles), louant une très jeune courtisane qui suit les traces de sa mère. La valeur n’attend pas le nombre des années, la petite se lance avec ardeur dans les combats amoureux.
Cypris est un des noms chypriotes de la déesse grecque Aphrodite. À nouveau j’ai conservé l’orthographe ancienne de l’ouvrage.
Sur une jeune Courtisanne.
Par le Sieur de Sygognes.
Ceste fille d’amour ce germe de Cypris,
Voyez comme elle suit ses parans à la trace,
Cest un corps en humeur qui charme les esprits :
Aussi dit-on qu’un chien souvent chasse de race.
Sa mere pour l’honneur de ses plus jeunes ans
De ce doux entretien avoit l’ame ravie,
Elle la veut suivre en donne à tous venans,
Afin qu’en ces combats elle honore sa vie.
D’un courage plus fier, d’un brusque maniement
Aux combats amoureux de jour en jour elle entre
Sa valeur la maintient, car en ce mouvement
Quand on la touche au vif elle pare du ventre.
Bref en mille façons, en passages divers,
Ores à la moderne, & ores à l’antique
De droict & de costé, de long & de travers,
Elle monstre à l’essay l’amoureuse pratique.
Jamais de cét accez le coeur ne luy defaut,
Tousjours fort à propos on la trouve en posture
C’est bien pour soustenir la fureur d’un assaut
Quand on joint l’artifice avec la nature.
Source du poème : Le cabinet satyrique, ou Recueil parfaict des vers picquans & gaillards de ce temps. Tiré des secrets Cabinets des Sieurs de Sygognes, Regnier, Motin, Berthelot, Maynard, & autres des plus signalez Poëtes de ce Siecle. Derniere Edition, reveuë, corrigee, & de beaucoup augmentee. A Paris, Jouxte la coppie imprimee à Roüen (1632). Numérisé sur Internet Archive. Le poème est page 96.
Ce poème a été transcrit dans la collection de textes L’Univers sensuel, sexuel et sentimental de la Fillette impubère, au travers de l’Histoire, de l’Ethnographie et de la Littérature, Tome I : Interactions entre enfants par François Lemonnier. Merci à lui pour avoir attiré mon attention sur ce poème et sur ce recueil.