Le poète français Germain Marie Bernard Nouveau, né le 31 juillet 1851 à Pourrières dans le Var, reste largement ignoré du grand public.
Au cours de sa jeunesse, il intégra les milieux d’avant-garde et rencontra plusieurs poètes, en particulier Charles Cros, Mallarmé, Arthur Rimbaud et Paul Verlaine. Frappé d’une crise de folie mystique en 1891, il fut interné à l’hôpital Bicêtre d’où il sortit après quelques mois. Il traversa plusieurs crises mystiques proches de l’aliénation, et finit par entreprendre une vie de mendiant et de pèlerin. Revenu dans son village natal en 1911, il y mourut d’un jeûne trop prolongé le 4 avril 1920.
Ses poésies seront essentiellement publiées après sa mort, Nouveau s’y étant opposé de son vivant. Son œuvre eut une grande influence sur les surréalistes.
Son recueil Valentines comprend des vers datant de la période 1885–1887, mais il fut publié seulement en 1921. Ces poèmes écrits sur un ton léger parlent notamment d’amour. L’un d’eux est intitulé « Les baisers » et quatre autres « Le baiser ». Voici le deuxième, le plus charmant et le plus sensuel des quatre :
LE BAISER
Comme une ville qui s’allume
Et que le vent achève d’embraser,
Tout mon cœur brûle et se consume,
J’ai soif, oh ! j’ai soif d’un baiser.
Baiser de la bouche et des lèvres
Où notre amour vient se poser,
Plein de délices et de fièvres,
Ah ! j’ai soif, j’ai soif d’un baiser !
Baiser multiplié que l’homme
Ne pourra jamais épuiser,
O toi, que tout mon être nomme,
J’ai soif, oui, j’ai soif d’un baiser.
Fruit doux où la lèvre s’amuse,
Beau fruit qui rit de s’écraser,
Qu’il se donne ou qu’il se refuse,
Je veux vivre pour ce baiser.
Baiser d’amour qui règne et sonne
Au cœur battant à se briser,
Qu’il se refuse ou qu’il se donne,
Je veux mourir de ce baiser.
Source du poème: Germain Nouveau, Valentines et autres vers, texte établi par Ernest Delahaye, Albert Messein, éditeur, Paris (1921), disponible sur Gallica, Internet Archive et Wikisource.