Je poursuis l’exploration du recueil anonyme Étrennes aux fouteurs, ou le calendrier des trois sexes. Le poème suivant, sous prétexte de conseils concernant l’éducation des enfants, se complait dans des descriptions explicites de scènes érotiques ; comme pour le précédent poème, j’ai conservé l’orthographe du 18e siècle, mais j’utilise la typographie moderne, en particulier pour la lettre ‘s’.
Le danger de l’exemple.
AIR : Gusman disoit à sa bergere.
DANS vos propos & dans vos gestes,
Gardez-vous bien, foibles parens,
D’offrir des exemples funestes
A ceux que l’on dit vos enfans.
L’enfance à mal faire est encline,
Et si nous ne la reprenons,
L’âge bientôt l’indiscipline,
Et la rend sourde à nos leçons.
Apprenez par ma chansonnette,
Le danger d’exposer souvent,
Aux yeux de l’enfance inquiete,
Ce que la pudeur nous défend.
L’enfance est un singe en lisiere,
Un écho toujours surveillant ;
Elle fait ce qu’elle voit faire,
Et répete ce qu’elle entend.
Deux époux, contre l’ordinaire,
S’adoroient comme deux amans ;
Sans cesse, occupés à se plaire,
Ils passoient les plus doux instans ;
Mais peu sages dans leurs caresses,
On eût pu les voir en tous tems
Se prendre tettons, pine & fesses,
En présence de leurs enfans.
Assez souvent, dame Lucette
Branloit le vit à son mari ;
Et le foutre sur une assiette
Etoit par elle recueilli :
Puis après, avec des mouillettes,
Elle étanchoit cette liqueur,
Et dévoroit jusques aux miettes,
D’un mets qui m’eût fait mal au cœur.
Autant de fois avec délice
Le mari la gamahuchoit.
Après ce louable exercice,
Il la foutoit & refoutoit.
De cette amoureuse licence
Leurs deux enfans étoient témoins :
Vous m’avouerez que la décence
Exigeoit un peu plus de soins.
L’un est garçon & l’autre fille.
Quand ils n’avoient que trois, quatre ans,
C’étoient-là des jeux de famille,
Qui leur sembloient indifférens ;
Mais on grandit, sans qu’on y pense ;
Et nature, insensiblement,
Ouvre bientôt l’intelligence
Avec la clef du sentiment.
Deux fois sept ans sont le partage
De la tendre & vive Zulmé.
Myrtil a presque le même âge,
Et ce couple est déjà formé.
Déjà Myrtil, avec ivresse,
Parcourt les appas de sa sœur ;
Elle répond à sa tendresse :
Tous deux respirent le bonheur.
Sein rondelet, pine longuette,
Foutre qui brûle de sortir,
Exemple qui souvent répete
La douce leçon du plaisir ;
Ma foi, n’en déplaise à l’usage,
Tout cela visoit droit au con :
Aussi, malgré le parentage,
Myrtil enfila tout de bon…
Myrtil enfila le passage
Où se forme le genre humain.
Zulmé partagea le voyage,
En dépit du veto romain.
On en porta plainte à Cythere.
Il y fut dit, sans trop jaser,
Que, puisqu’amour foutoit sa mere,
Frère & sœur pouvoient se baiser.
Source du poème : Étrennes aux fouteurs, ou le calendrier des trois sexes. Orné de jolies figures en taille douce. À Sodome et à Cythère, et se trouvent plus qu’ailleurs, dans la poche de ceux qui le condamnent (1793). L’ouvrage est numérisé sur Gallica, et une transcription hypertexte est donnée sur Wikisource.