La deuxième édition de la collection Dédicaces, publiée en 1894, comprend quatre poèmes dédiés à des petites filles, en particulier Renée Zilcken et Jeanne Vanier. Je présente ici les deux autres, adressés à des demoiselles qui me restent inconnues.
Tout d’abord le poème numéroté LXV. La petite fille, toute mignonne, à l’âge de l’innocence, a déjà le charme d’une femme :
À Mlle Eveline
par Paul Verlaine
Eveline, mais c’est Ève
En miniature et c’est
Tout le charme et tout le rêve
Que notre esprit caressait
Quand naguère il s’agissait
Encore d’enfance brève
Qui grandit et grandissait
Dans la femme qui s’achève.
Mais où va donc mon Sonnet ?
Vous êtes toute mignonne
Et l’âge en fleurs vous couronne.
Votre âge gai ne connaît
Que l’innocence divine…
Riez, petite Eveline !
Ensuite le poème numéroté LXVI. Le bruit que fait la petite fille console le poète, qui se souvient de sa propre enfance :
À Mlle Léonie R…
par Paul Verlaine
Vous emplissez d’un bruit gentil, quoique terrible,
Ma tête que console un tapage d’enfant,
— Et mon cœur qu’il est difficile qu’on console !
Vous me rendez la joie et je suis triomphant
De moi-même, ce moi-même qui fut horrible
Lorsqu’une enfant aussi, criait, méchante et folle
Et bonne, au fond, quand j’étais moi-même un enfant
Aux yeux vrais, au sang pur comme d’une mouette
Qui revient de très loin, ainsi que ce poète.
Source des poèmes : Paul Verlaine, Œuvres complètes, Tome III, Vanier, 1901, pages 164 et 165.