Chansons secrètes de Bilitis, par Pierre Louÿs

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AK von Malmborg – Untitled (2016)

Grand amateur d’érotisme, Pierre Louÿs a tout au long de sa vie écrit un très grand nombre de ce qu’on a appelé des curiosa, des ouvrages à caractère érotique ; il a notamment doublé certaines de ses œuvres publiées d’une version sexuellement explicite. La plupart de ces textes furent publiés après sa mort survenue en 1925.

En particulier, il donna une courte suite érotique à ses célèbres Chansons de Bilitis : un recueil de 21 poèmes en prose intitulé Chansons secrètes de Bilitis, publié à Paris en 1933. Je donne ici 4 d’entre eux, qui parlent des désirs des très jeunes filles et de la curiosité des petits enfants :

IMPATIENCE

Elle se jeta dans mes bras en pleurant, et longtemps et longtemps, je sentis sur mes joues couler ses pauvres larmes chaudes avant qu’elle expliquât ainsi sa douleur :

« Hélas, je ne suis qu’une enfant ; les jeunes hommes ne me regardent pas. Quand aurai-je comme toi mes mamelles rondes, et des poils épais, et le sang de chaque mois !

« Nul n’a les yeux ardents si ma tunique glisse. Si je me couche dans les champs, nul ne s’étend sur moi. Nul ne me dit qu’il me tuera si je jouis par un autre. »

Je lui ai répondu doucement : « Sélanis, petite vierge, tu cries comme une chatte à la lune et tu t’agites sans raison. Les vulves les plus impatientes ne sont pas les plus tôt rompues. »

LES PETITS ENFANTS

La rivière est presque à sec ; les joncs flétris meurent dans la fange ; l’air brûle, et loin des berges creuses, un ruisseau clair coule sur les graviers.

C’est là que du matin au soir les petits enfants nus viennent jouer. Ils marchent dans la rivière basse et glissent quelquefois sur les roches.

Ils se moquent de leurs petits sexes, et pourtant ils veulent s’en servir, mais les petites fentes sont trop menues et les petits membres sont trop peu hardis.

Et quand, laissant ma tunique dans l’herbe, j’entre dans l’eau avec eux, ils émerveillent leurs doigts dans mes poils et cherchent mon clitoris chaud.

LES CONTES

Je suis aimée des petits enfants ; dès qu’ils me voient, ils courent à moi, et s’accrochent à ma tunique et prennent mes cuisses dans leurs petits bras.

Ils me font asseoir devant eux, ils m’embrassent sur le cou, ils me supplient avec les yeux. Je sais bien ce que cela veut dire : « Bilitis chérie, montre-nous (car nous sommes gentils),

Tes mamelles qui sont si drôles avec leur tache rose et pointue ; tes aisselles qui sentent bon et où des mèches noires ont poussé (est-ce que nous en aurons aussi ?),

Et surtout, laisse-nous tirer (sans te faire mal, Bilitis chérie), les boucles douces de ton ventre et les belles lèvres qui sont dessous. »

LE PORNÉÏON

Étranger, ne va pas plus loin dans la ville. Tu ne trouveras ailleurs que chez moi des filles plus jeunes ni plus expertes. Je suis Sostrata, célèbre au-delà de la mer. J’ai dix-huit belles filles à ton choix.

Vois celle-ci, dont les fesses sont rondes comme des pommes. Tu n’en veux pas ? Voici d’autres fesses qui sont grasses comme du beurre et un anus étroit et fort que tu perceras avec peine, et qui se nouera serré pour t’arracher la jouissance.

J’ai mieux encore. — Plango, ouvre ta cyclas. — Étranger, ses seins sont raides comme des boucliers, touche-les. Et son beau ventre, tu le vois, porte les trois plis de Kypris. Et regarde cette vulve saillante, comme un concombre fendu.

Je l’ai achetée avec sa sœur, qui n’est pas d’âge à aimer encore, mais qui sait téter le lait des hommes, et te léchera par-derrière pendant que tu feras l’amour. Par les deux déesses ! tu es de race noble. Myrtis et Plango, suivez le chevalier.

Source des poèmes : Pierre Louÿs, Chansons secrètes de Bilitis, 1ère publication à Paris en 1933, numérisé sur Wikisource.

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